Un passeport européen pour les batteries arrive

Les batteries des voitures électriques reçoivent désormais, pour ainsi dire, un passeport : à partir du 18 février 2027, un passeport numérique devra documenter, entre autres, la puissance, les données de base, l’origine des matériaux et la recyclabilité de chaque batterie de traction dans l’UE. Markus Peter, responsable technique & environnement à l’UPSA, explique : « Le passeport de la batterie doit garantir que la batterie soit utilisée le plus longtemps et le mieux possible, en tant que pièce du véhicule, stockage intermédiaire et recyclage ». Ce passeport de la batterie enregistrera probablement non seulement des informations statiques, mais également des informations dynamiques, par exemple sur les défauts ou l’entretien. Il pourrait donc s’agir d’une nouvelle obligation pour la branche automobile et ainsi d’un surcoût potentiel pour les garages. Mais l’ensemble peut aussi être considéré sous l’autre angle comme une chance : parce que le passeport batterie raconte l’histoire de la batterie, il crée de la transparence, ce qui peut inspirer confiance, notamment lors de ventes d’occasion.
Ce qui attend les garages
Au niveau technologique, des préparatifs concrets sont déjà en cours en Suisse, par exemple chez BloqSens AG à Bienne. La start-up développe des solutions numériques pour la preuve infalsifiable des données de la batterie via la blockchain. La technologie est axée sur les prescriptions du règlement européen sur les batteries, elle est donc conforme à l’UE. BloqSens est l’un des précurseurs en Suisse, tandis qu’à travers l’Europe, d’autres initiatives bricolent des solutions d’adaptation des batteries. Peter Krummenacher, CEO de BloqSens, déclare : « Nous ne savons pas encore exactement ce que le passeport batterie signifie concrètement pour les garagistes en Suisse ». Comme la Suisse est étroitement liée à l’UE dans le commerce des véhicules, elle devrait devoir se conformer aux prescriptions européennes. On ne sait pas encore dans quelle mesure. De même que des détails tels que les possibilités d’accès : qui peut voir et saisir quelles données ?
Ses hypothèses sont donc à prendre avec réserve, souligne P. Krummenacher, qui explique que le passeport batterie doit être techniquement standardisé. Un code QR sur la batterie de traction mènera à un ensemble de données que l’on pourra authentifier dans son rôle respectif (par exemple en tant que garage ou entreprise de recyclage). « Quelle que soit la marque de la voiture, les ateliers devraient ainsi avoir accès aux données d’entretien, de diagnostic et d’état de santé », explique le PDG de BloqSens. Les événements d’erreur, tels qu’une surchauffe détectée par le système de gestion de la batterie (BMS), devraient également être transmis automatiquement au passeport de la batterie. Les autres informations, telles que l’entretien ou le changement de module, seront probablement inscrites par les garages. « Le passeport de la batterie simplifie les réparations », ajoute P. Krummenacher. « Le garage peut voir ce qui s’est passé et travailler en conséquence ». Les données figurant dans le passeport de la batterie appartiennent au propriétaire de la batterie, c’est-à-dire le plus souvent au propriétaire du véhicule. Les fabricants, les garages ou autres ne devraient avoir accès que dans la mesure où ils y sont autorisés. Les fabricants introduisent des données surtout au début du cycle de vie, alors que les garages le font plutôt plus tard.
P. Krummenacher énumère six catégories de données dans le passeport : Basic (données statiques), Performance (puissance), Lifetime (cycles de charge), Event Log (p. ex. surchauffe), composition des matériaux ainsi que des indications sur le démontage et la réutilisation. « Nous enregistrons les données de base et les événements dans la blockchain », explique P. Krummenacher, « la durée de vie et les données de performance ne le sont pas. Grâce à la grande quantité de données statiques et dynamiques, le passeport de la batterie fait office de « jumeau numérique » de la batterie, selon P. Krummenacher.
Le point de vue de l’OFEV
Qu’advient-il du passeport de la batterie si celle-ci est retirée et utilisée à d’autres fins, par exemple dans le cadre d’une application de seconde vie ou d’un recyclage ? Peter Krummenacher explique : « Le passeport suivra la batterie. Si elle est démontée, l’enregistrement est conservé, mais son propriétaire change. Plus tard, lors du recyclage ou de la fin de vie, le jumeau numérique continuera d’être disponible, probablement pendant dix ans ». En cas de renouvellement complet du module, un nouveau passeport de la batterie devrait être établi. L’histoire ancienne sera toutefois conservée.
A l’Office fédéral de l’environnement (OFEV), Corinne Spillmann, de la division Déchets et matières premières, souligne la pertinence réglementaire de l’introduction du passeport pour batteries de l’UE. Selon elle, « les entreprises suisses qui exportent des batteries ou des véhicules électriques vers l’UE doivent se conformer aux exigences de l’UE ». On ne sait pas encore si la Suisse adoptera la plate-forme de l’UE, c’est-à-dire l’infrastructure numérique de tous les passeports de batteries de l’UE, ou si elle suivra une voie nationale. En outre, il faut vérifier, selon C. Spillmann, si la Suisse peut réellement adhérer à la plate-forme de l’UE, et si oui, à quelles conditions. En effet, il manquait encore de nombreux détails pour la mise en œuvre pratique. De même, les garages ne seraient dans un premier temps concernés que dans un contexte d’exportation. « Les ateliers suisses doivent respecter les directives s’ils exportent des batteries ou des véhicules équipés de batteries de traction dans l’espace de l’UE », explique C. Spillmann. Que deviennent les certificats de batterie actuels, en tant que « certificat de santé », un instantané, alors que le passeport de batterie documente le cycle de vie ? « Nous ne pouvons pas encore répondre à la question de savoir si le passeport rendra le certificat superflu », a déclaré C. Spillmann.
En fin de compte, beaucoup de choses restent encore à déterminer en ce qui concerne le passeport de batterie. Il est toutefois clair que celui-ci pourrait entraîner des dépenses en termes de gestion des données. Le personnel des ateliers qui entretient et répare les batteries de traction devra alors s’en occuper. Pourtant, le passeport batterie recèle le potentiel de devenir un instrument de vente. C’est pourquoi les garages devraient se pencher suffisamment tôt sur le sujet afin de pouvoir utiliser le passeport batterie à partir de 2027.